AG de l'association des maires de Vaucluse

C'était ce matin à Caumont sur Durance.

Voici le rapport moral que j'ai présenté à cette occasion, en ma qualité de secrétaire général de l'AMV

Mesdames et Messieurs,

Bonjour et merci d’être venus à notre AG qui, chaque année, constitue un moment fort de notre association. Soyez remerciés pour l’intérêt que vous témoignez ainsi à notre association et à nos travaux.

Mes chers collègues élus, c’est notre première assemblée générale ordinaire après les dernières élections municipales, aussi m’est-il agréable de commencer par vous féliciter d’avoir brillamment réussi votre examen de passage.

Bienvenue aux nouveaux maires qui ont reçu leur baptême du feu et qui, certainement, ont commencé à comprendre que passer du rêve à la réalité n’est pas chose facile. La réalité est toujours complexe car tout est lié à tout. Je leur souhaite beaucoup de courage car leur vie de maire a peu de chances d’être un long fleuve tranquille. Ce sera une vie de labeur et de combat.

Quant aux anciens, vous, chers collègues, je suis heureux de vous retrouver et de voir que le suffrage universel vous a confirmés dans vos fonctions. C’est la preuve que vous étiez de bons maires. Vous avez fait vos preuves, vous savez que la réalité est dure, vous savez qu’il convient d’être de plus en plus pointus dans l’exercice de nos mandats.

Aucun maire chevronné ne me contredira si je dis que la fonction de maire évolue d’année en année et que la mandature qui est devant nous n’aura certainement rien à voir avec ce qui se passait dans les années 80 ou 90, voire au cours de celle qui vient de se terminer. La fonction de maire a considérablement changé et elle ne va pas cesser de le faire, ne serait-ce qu’en raison des grands chantiers législatifs qui s’ouvrent devant nous et de la volonté affirmée du Président de la République de les mener à bien dans les meilleurs délais.

De la même manière que notre fonction de maire est appelée à évoluer, notre association des maires doit s’adapter en conséquence. D’amicale, elle doit gagner en professionnalisme et devenir une organisation dans laquelle chacun de nous, maires du Vaucluse, peut trouver assistance technique et juridique ainsi qu’une certaine solidarité. Il est essentiel pour cela d’établir entre nous un code de bonne conduite, véritable code de déontologie entre élus. Je m’en expliquerai dans quelques instants.

Voyons d’abord, si vous le voulez bien, quelques aspects de notre nouvelle mandature, seulement quelques aspects sans prétendre à l’exhaustivité.

1er constat : Tout bouge !

En soi, ce n’est pas un mal, c’est même plutôt plaisant. La difficulté tient à un manque de visibilité chronique alors que nous, maires, à tout instant, nous devons prendre des décisions.

La réorganisation de l’Etat, le regroupement DDE-DDA, la recomposition territoriale des communes, des intercommunalités, des départements et des régions, et d’autres choses encore vont changer considérablement le paysage dans lequel nous allons devoir travailler.

Le tout intercommunal, avec des communautés plus grandes qu’elles ne le sont aujourd’hui, semble un des impératifs de l’Etat. L’Etat en effet a sans doute besoin d’intercommunalités suffisamment puissantes pour être capables à la fois de supporter les transferts de charge et également de constituer des espaces de solidarité. La grande question qui se pose est de savoir comment communes et communauté vont s’articuler ; et je sais, à ce sujet, que beaucoup de maires se disent qu’il vaut peut-être mieux « être premier dans son village que second à Rome ».

Grand sujet de préoccupation des maires : où trouver l’argent pour répondre aux attentes croissantes de nos administrés, ou tout au moins, plus modestement, comment ne pas régresser ?

- Vous le savez, les dotations de l’Etat ne progressent pas au rythme du panier du maire. Ce n’est pas nouveau, on perd ainsi chaque année pratiquement 3 ou 4% de notre pouvoir d’achat d’élu. On parle maintenant de l’intégration du FCTVA dans l’enveloppe normée, c’est-à-dire d’un plafonnement de celui-ci ; voilà encore un coup qui va être porté à notre capacité à investir et par voie de conséquence au chiffre d’affaires du BTP, donc à l’économie nationale.

- On parle aussi de réforme de la fiscalité locale, on en parle oui, on en parle en fait depuis longtemps, mais on n’a toujours rien vu et on ne sait même pas si on verra quelque chose un jour.

- Par contre, il y a quelques années, on nous a dit « entrez en intercommunalité, faites des projets, vous avez un impôt dynamique pour cela : la Taxe Professionnelle ». Puis, quelques années après, on nous a dit : « Stop, plafonnée la TP ! ». Et maintenant, histoire d’épaissir un peu plus le brouillard, le Président de la République nous dit « tous comptes faits, on va peut-être supprimer la TP » ; pour la remplacer par quoi ? cela on ne nous le dit pas, ce serait trop facile.

- Autre sujet catastrophique pour nous, la CAF ! Après nous avoir incité à apporter des services à nos populations et nous avoir dit : « allez-y, on vous aide financièrement, on vous accompagne dans votre développement », après nous avoir bien excités, la CAF nous lâche. A nous de nous dépatouiller avec nos populations : supprimer des services, augmenter les tarifs ou augmenter nos impôts alors que les familles elles-mêmes subissent une diminution notable de leur pouvoir d’achat, le contraire même de ce qui leur a été promis durant la campagne présidentielle. Pas facile !

Je pourrais allonger la liste car on n’a pas encore parlé par exemple des dispositions pratiques du Grenelle de l’environnement. Certes le Grenelle 1 est une belle avancée dans la bonne direction du développement durable. Tout le monde s’en félicite. Mais inévitablement le Grenelle 2 va imposer de nouvelles normes qui, in fine, vont se traduire en euros dans nos budgets. Combien et comment allons-nous payer ? c’est une vraie question.

Bref, vous l’avez compris, noir c’est noir ! Aucune visibilité ! On est dans le brouillard ! une vraie purée de poix ! Comment aller de l’avant dans ces conditions ? Comment faire du développement, tout au moins quand on peut en faire, car ce n’est pas le cas pour toutes les communes ? Gérer c’est anticiper, dit-on ! Force est de constater qu’il très dur d’anticiper par les temps qui courent !

Mes chers collègues, on n’est pas là pour se lamenter sur notre sort, ni pour se positionner en victimes du Gouvernement. Nous ne sommes pas atteints de sinistrose. Je pense qu’on est tous conscients de l’état des finances de la France et de l’impérieuse nécessité de retrouver un équilibre. Je pense en outre que, nous les maires, nous sommes des hommes et des femmes responsables et que nous sommes prêts à prendre notre part – toute notre part – dans les efforts à faire pour sortir de la crise.

Ceci étant, de quoi avons-nous le plus besoin dans nos difficultés qui sont grandes et qui sont accrues par ce manque crucial de visibilité ?

Déjà un peu plus de considération et de compréhension de la part de l’Etat ne nous ferait pas de mal ! Oui, Monsieur le Préfet, on a envie de se sentir aimés. On a envie de trouver dans l’Etat plus un facilitateur qu’un censeur.

Permettez-moi un exemple personnel pour illustrer mon propos, mon exemple est personnel mais néanmoins assez bien représentatif.

J’ai été appelé à comparaître, il y a quelques mois, devant la commission chargée du constat de carence, relativement au fameux article 55 de la loi SRU. J’ai vécu là une expérience assez curieuse, qui m’a personnellement plutôt amusé car, d’un coup, ô bonheur ! je me suis senti rajeunir de 50 ans : je me suis en effet retrouvé jeune collégien, convoqué par le directeur, et réprimandé parce que je n’avais pas bien fait mes devoirs.

Je ne sais pas si les autres collègues maires, convoqués pour les mêmes raisons, ont apprécié la situation avec le même amusement que moi, toujours est-il que je ne pense pas que les maires que nous sommes aient à être traités de la sorte. D’autant que cela ne sert à rien ! Ce n’est pas en nous faisant passer devant le conseil de discipline et en nous mettant des heures de colle que nous construirons plus de logements sociaux. Si c’est réellement l’efficacité qui est recherchée, si on veut favoriser la construction de logements sociaux, on gagnerait sans doute beaucoup à ce que l’Etat quitte son rôle de censeur et aille voir du côté du comité des financeurs pour jouer là le rôle de facilitateur qui est attendu de lui.

Nous attendons de l’Etat, conseil et facilitation.

Néanmoins, nous savons aussi que nous ne devons pas tout attendre des services de l’Etat, nous devons nous organiser, nous devons nous renforcer en tant qu’AMV.

Et pour cela, nous devons commencer par être solidaires. Nous ne devons pas jouer les uns contre les autres comme nous venons d’en faire la douteuse expérience. Nous devons au contraire serrer les coudes, nous devons nous doter, au sein de l’AMV, d’une véritable capacité d’expertise.

Je pense notamment au projet de loi qu’Alain Marleix, secrétaire d’Etat aux collectivités locales, nous a présenté à Montpellier au congrès de l’AdCF, il y a quelques semaines. Projet de loi qui nous intéresse au 1er chef, mes chers collègues. Il faut être un peu branché intercommunalité, mais je vais faire simple. Il s’agit pour le Gouvernement :

  • d’une part de terminer la carte de l’intercommunalité en obligeant toute commune isolée à rejoindre de gré ou de force un EPCI au plus tard le 1er janvier 2014
  • et d’autre part d’assouplir la procédure de fusion entre communautés de manière à favoriser l’agrandissement des périmètres.

Aujourd’hui pour que deux communautés fusionnent, il faut réunir 4 conditions :

  • que le Préfet valide le projet de périmètre englobant les deux communautés
  • que dans ce périmètre les communes votent favorablement à la majorité qualifiée (la moitié des communes représentant les 2/3 de la population ou l’inverse)
  • que chacun des 2 conseils communautaires vote favorablement à la majorité simple.

En clair, aujourd’hui, la fusion ne peut se faire que si les 2 communautés sont consentantes. Demain, ce ne sera plus le cas. Pour que la fusion soit prononcée, il suffira qu’à l’intérieur du projet de périmètre, les communes votent à la majorité qualifiée. La procédure se trouve en effet terriblement assouplie. Imaginez deux communautés : une grosse et une petite. La grosse demande au Préfet de dessiner un périmètre englobant les deux communautés. Le Préfet répond : « Avec plaisir, Madame ou Monsieur le Président ». Les communes du nouveau périmètre sont appelées à voter. Quel que soit le vote des communes de la petite communauté, la majorité qualifiée est acquise à la grosse communauté. Le tour est joué d’avance, la fusion est inéluctable.

J’appelle cela la légalisation de la loi de la jungle, car les gros vont être autorisés à manger les petits en toute légalité. Je vois d’ici le Préfet dans son fauteuil, se frisant les moustaches, et nous disant benoîtement : « Mesdames et Messieurs les maires, aimez-vous ! mangez-vous les uns les autres ! ». Bonjour l’ambiance !

C’est cela qui nous attend demain, mes chers collègues. Pour semer la zizanie entre nous, et durcir les positions des uns et des autres, il n’y a pas mieux. C’est pourquoi, je pense qu’il est essentiel et urgent que nous nous saisissions de cette question, mes chers collègues, et que nous nous dotions d’une charte de bonne conduite.

Au sein de l’AMV, et depuis longtemps déjà, nous avons été capables collectivement d’accepter notre pluralisme politique et de le dépasser par le respect mutuel. Il nous appartient aujourd’hui de faire un pas de plus dans ce respect mutuel sous la forme d’un code de bonne conduite, d’un pacte de non agression et de respect de l’autre. Il s’agit d’une condition de survie pour notre association. C’est une des raisons pour lesquelles nous avons décidé de tenir des Etats Généraux de l’intercommunalité. Je vous en parlerai mieux tout à l’heure.

Je conclurai mon intervention en soulignant les difficultés multiples qui sont devant nous et la nécessité de les affronter en nous organisant. Oui, en nous organisant !

En nous organisant à deux niveaux :

  • d’abord, pour serrer les coudes et faire corps, sans nous laisser diviser, car un jour ou l’autre, chacun peut se trouver dans le rôle de la victime,
  • ensuite, en nous dotant au sein de l’AMV, d’une capacité d’expertise, technique et juridique, une véritable capacité qui nous arme pour relever les défis qui nous attendent.

Ces deux résolutions me paraissent un minimum si, comme Obama, nous voulons pouvoir dire : « Yes, we can ! »

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